L'offrande de ta vie,
un tissu dont tu ne sais ce qu'il sera
mais qui autour de toi
peu à peu se tisse
sans modèle, ni dessin savant.
Dans ce tissu, tu es un fil,
un trait de couleur...
bleu profond ? rouge éclatant ?
ou bien le fil de lin gris ?
cette troisième couleur, au dire des
tisserands,
est la plus importante.
Le gris neutre de tous les jours,
celui qui fait chanter le bleu profond
et le rouge éclatant ;
celui qui est porteur d'harmonie.
N'avoir que sa propre couleur
et de cela se réjouir,
pour qu'elle apporte la joie
non la rivalité.
Comme si moi, bleu,
j'étais l'ennemi du vert ;
comme si j'étais, moi, ton adversaire !
Et ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas
entrer avec nous dans l'ouvrage ?
Il y a place pour tous.
Et chaque fil vient se mêler au dessin
et apporter une continuité,
non seulement ceux qui à l'origine du travail
ont été tendus d'un support à l'autre du
métier
mais chaque fil.
Un fil vient à se rompre,
aussitôt le travail tout entier s'arrête
et les mains patientes du tisserand
s'appliquent à le renouer.
Chaque fil même le plus
lumineux
peut disparaître, tissé sous les autres,
finir.
Il est là cependant, non loin,
même si notre œil ne le
perçoit plus...
Maintenant c'est au tour du tien
d'être lancé à travers la chaîne.
Quand son trait aura cessé d'être visible,
alors toute l'harmonie apparaîtra,
harmonie de ta nuance mêlée à toutes les
autres
qui l'accompagnent jusqu'à ce qu'elle
disparaisse.
La chaîne, comme fond,
demeure
tout en se renouvelant
pour que la trame puisse jouer
entre ses fils tendus.
Pas d'offrande inutile, mais force de
création,
joie calme et grave, tissu d'amour.