Mourir c'est émigrer vers un plus riche ombrage
Il avait fait un vœu dans sa maturité
C'est par un soir de mai que je voudrais mourir.
Les soirs de mai sont beaux; la terre va fleurir;
L'air est comme peuplé de voix inentendues,
Et l'on sent Dieu qui passe au fond des étendues.
Dans les lointains, ainsi qu'une paupière d'or
S'abaisse le couchant sur la mer qui s'endort.
Les nuages, vêtus de gaze aux longues franges,
Glissent furtifs et doux et c'est comme an chœur d'anges
Qui des hauteurs du ciel descendraient vous chercher.
Ce vœu ne s'est pas réalisé.
Il put voir, à son dernier soir, des fenêtres de sa villa Gyptis
une mer scintillante et bleue;
mais ce n'était que l'Armor.
ANATOLE LE BRAZ , le barde au coeur d'or (2 avril 1859- 20 mars 1926)
Poème à A M. Auguste Dupouy, un ami de Quimper, qu'il écrivait quelques semaines avant sa mort en l'invitant à le venir voir « Venez avant qu'il ne soit trop tard »