Une fois encore avant de poursuivre
Ma route et de porter plus loin mes regards,
J'élève, solitaire, mes mains
Vers Toi et je te supplie
Toi à qui j'ai solennellement consacré
Des autels dans les fonds ultimes de mon cœur
De me faire à chaque heure
Entendre à nouveau ta voix.
En exergue, inscrits profondément,
Brûlent ces mots : Au Dieu Inconnu.
Je suis sien même si je suis resté dans la meute
Du crime jusqu'à cette heure
Je suis sien, je sens ses liens
Qui dans le combat me couchent sur le sol,
Et qui — si je désirais fuir
M'obligeraient encore à le servir.
Je veux Te connaître, Inconnu,
Toi qui t'agrippes si profondément dans mon âme,
Toi qui dans ma vie erres comme une tempête,
Toi l'Insaisissable, Toi mon Parent !
Je veux te connaître, même te servir.
Frédérich Nietzsche, Premiers Poèmes, 1864