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07/05/2016

Du vrai et du fait


Giambattista Vico  
De l’antique sagesse de l’Italie
CHAPITRE PREMIER, Du vrai et du fait.
 
Les mots verum et factum, le vrai et le fait, se mettent l’un pour l’autre chez les Latins, ou, comme dit l’école, se convertissent entre eux. Pour les Latins, intelligere, comprendre, est même chose que lire clairement et connaître avec évidence. Ils appelaient cogitare ce qui se dit en Italien pensare et andar raccogliendo ; ratio, raison, désignait chez eux une collection d’éléments numériques, et ce don propre à l’homme qui le distingue des brutes et constitue sa supériorité ; ils appelaient ordinairement l’homme un animal qui participe à la raison (rationis particeps), et qui par conséquent ne la possède pas absolument. De même que les mots sont les signes des idées, les idées sont les signes et les représentations des choses. Ainsi comme lire, legere, c’est rassembler les éléments de l’écriture, dont se forment les mots, l’intelligence (intelligere) consiste à assembler tous les éléments d’une chose, d’où ressort l’idée parfaite. On peut donc conjecturer que les anciens Italiens admettaient la doctrine suivante sur le vrai : Le vrai est le fait même, et par conséquent Dieu est la vérité première, parce qu’il est le premier faiseur (factor) ; la vérité infinie, parce qu’il a fait toutes choses ; la vérité absolue, puisqu’il représente tous les éléments des choses, tant externes qu’internes, car il les contient. Savoir, c’est assembler les éléments des choses, d’où il suit que la pensée (cogitatio) est propre à l’esprit humain, et l’intelligence à l’esprit divin ; car Dieu réunit tous les éléments des choses, tant externes qu’internes, puisqu’il les contient et que c’est lui qui les dispose ; tandis que l’esprit humain, limité comme il l’est, et en dehors de tout ce qui n’est pas lui-même, peut rapprocher les points extrêmes, mais ne peut jamais tout réunir, en sorte qu’il peut bien penser sur les choses mais non les comprendre ; voilà pourquoi il participe à la raison, mais ne la possède pas. Pour éclaircir ces idées par une comparaison, le vrai divin est une image solide des choses, comme une figure plastique ; le vrai humain est une image plane et sans profondeur, et telle qu’une peinture. Et de même que le vrai divin est parce que Dieu, dans l’acte même de sa connaissance, dispose et produit, de même le vrai humain est pour les choses où l’homme, dans la connaissance, dispose et crée pareillement. Ainsi la science est la connaissance de la manière dont la chose se fait, connaissance dans laquelle l’esprit fait lui-même l’objet, puisqu’il en recompose les éléments ; l’objet est un solide relativement à Dieu qui comprend toutes choses, une surface pour l’homme qui ne comprend que les dehors. Ces points établis, pour les faire accorder plus aisément avec notre religion, il faut savoir que les anciens philosophes de l’Italie identifiaient le vrai et le fait, parce qu’ils croyaient le monde éternel ; par suite les philosophes païens honorèrent un Dieu qui agissait toujours du dehors, ce que rejette notre théologie. C’est pourquoi dans notre religion où nous professons que le monde a été créé de rien dans le temps, il est nécessaire d’établir une distinction, en identifiant le vrai créé avec le fait, et le vrai incréé avec l’engendré (genito). Ainsi l’Écriture sainte, avec une élégance vraiment divine, appelle verbe la sagesse de Dieu, qui contient en soi les idées de toutes choses et les éléments des idées elles-mêmes ; dans ce verbe le vrai est la compréhension même de tous les éléments de cet univers, laquelle pourrait former des mondes infinis ; c’est de ces éléments connus et contenus dans la toute-puissance divine que se forme le verbe réel, absolu, connu de toute éternité par le Père, et engendré par lui de toute éternité.


 
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