Giambattista
Vico (1668 – 1744)
DE L’ANTIQUE
SAGESSE DE L’ITALIE RETROUVÉE DANS LES ORIGINES DE LA LANGUE LATINE.
CHAPITRE III, Des causes ("La clarté du vrai métaphysique")
Souvent dans leurs livres ascétiques
les sages de notre religion, c’est-à-dire ceux qui se sont illustrés par leur
connaissance de la Divinité comme par la sainteté de leur vie, ces sages
remontent de la contemplation d’une fleur à la pensée de Dieu ; parce
qu’ils reconnaissent dans la formation de cette créature la puissance infinie.
C’est ainsi que nous avons dit dans notre Dissertation sur la méthode
d’études suivie de notre temps : « Nous démontrons les
propositions géométriques parce que nous les faisons ; si nous pouvions
démontrer la physique, nous la ferions. » Il faut donc stigmatiser comme
coupables d’une curiosité téméraire et impie ceux qui essaient de prouver a
priori le Dieu très bon et très grand. Ce n’est rien moins que se faire le
Dieu de Dieu, et nier le Dieu qu’on cherche. La clarté du vrai métaphysique est
comme celle de la lumière, que nous ne connaissons que par l’obscurité.
Regardez longtemps et attentivement une fenêtre grillée, qui laisse arriver la
lumière dans la chambre ; puis tournez les yeux vers un corps absolument
opaque, il ne vous semblera plus voir la lumière, mais un grillage lumineux. De
même le vrai métaphysique est absolument clair, il n’a point de limite, et
point de forme qui le détermine, parce qu’il est le principe infini de toutes
les formes ; les choses physiques sont opaques, c’est-à-dire qu’elles ont
une forme et des limites, et c’est en ces choses que nous voyons la lumière du
vrai métaphysique.